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Au delà de mes rêves
1 décembre 2009

Paris dans l'oeil du cyclone ???

Enquête

Il y a des hasards malheureux. Mercredi 18 novembre, la Mairie de Paris inaugurait - à 11 heures du matin - son nouveau portail Internet, Paris Nightlife, à destination des touristes. La veille, l'association Technopol mobilisait le monde de la nuit autour d'une pétition en forme de cri d'alerte. Son slogan : "La nuit meurt en silence", agrémenté d'un conseil : "Fermé pour cause de ville morte, merci de vous adresser à une capitale voisine." Au hasard, Berlin, Londres ou Barcelone. Trois villes devenues ces dernières années les destinations favorites des easy clubbers, ces fêtards qui, depuis l'essor de l'aviation low cost (et de sa compagnie emblématique Easy Jet), y partent faire la fête le temps d'un week-end pour moins de 40 euros.

Ce n'est pas la première fois qu'on annonce la mort imminente de la nuit parisienne, qu'on déplore son manque de dynamisme et d'audace par rapport à ses voisines, supposées plus cosmopolites, plus folles, plus libres. Le serpent de mer est connu. Mais, avec plus de 12 828 signatures à ce jour, la pétition a rencontré un succès inattendu chez les professionnels, qu'il s'agisse de bars musicaux, de salles de concerts ou de discothèques. Le signe d'un réel malaise dans un secteur aux contours assez flous, personne ne sachant exactement le nombre d'établissements ouverts la nuit. La préfecture de police avance le chiffre de 3 000, dont 300 discothèques, mais admet qu'il ne s'agit là que d'une estimation.

"En tout cas, c'est un ras-le-bol général qui s'exprime"
, assure le producteur de spectacles Jules Frutos (Alias Productions), à la tête de trois salles de concerts (le Bataclan, la Maroquinerie, la Flèche d'or, rouverte depuis le 23 novembre). J'ai signé parce que j'estime qu'il faut se manifester aujourd'hui face à une situation moraliste, répressive, qui n'a fait que s'aggraver ces derniers temps."

En cause, l'arsenal réglementaire "aberrant et contradictoire" auquel ils doivent faire face aujourd'hui, explique Renaud Barillet, directeur de La Bellevilloise, un café-concert ouvert en 2007. "Nous vivons suspendus à un risque de fermeture administrative." La classification administrative ERP (qui détermine les jauges des lieux) serait obsolète, les conséquences de la loi antitabac incompatibles avec le décret antibruit, sans oublier les a priori négatifs sur certaines musiques (électro et rap principalement)... "C'est bien simple, résume Jules Frutos, on ne parle plus de notre activité qu'en termes de "nuisances" aujourd'hui. Ça donne le ton ! Nous avons annulé 50 % de soirées clubbing par peur des plaintes depuis le mois de septembre."

Les plaintes de voisinage sont en "légère augmentation", confirme Renaud Vedel, chargé des relations avec la Ville à la Préfecture de police. Mais, avec 107 autorisations de nuit refusées en 2008 et 66 en 2009 sur un millier en cours, il réfute l'accusation de "sévérité croissante" et note l'arrivée de "jeunes acteurs qui ne connaissent pas toujours les règles, donc ne les comprennent pas". Ou manquent parfois d'organisation. "Nous n'avons jamais vraiment eu d'interlocuteur représentatif dans le domaine des musiques électro, par exemple."

Serait-il vraiment plus facile d'organiser une soirée à Berlin, Londres ou Barcelone ? Oui. C'est le "Rapport sur la compétitivité nocturne de Paris" qui le dit (réalisé par l'Ecole de guerre économique, juin 2009). Une étude commandée par la Mairie qui compare les nuits de Londres, Amsterdam, Barcelone et Berlin... et place aujourd'hui Paris en dernière position. La législation n'est pas seule en cause. Offre de transport, sentiment d'insécurité, tarifs, sentiment de liberté... A chaque fois, la Ville Lumière en prend pour son grade.

Destiné à guider les touristes dans les folles nuit parisiennes, le lancement de Paris Nightlife résonne involontairement comme un aveu de faiblesse, en dépit des nuances apportées par Jean-Bernard Bros, adjoint au maire chargé du tourisme, à l'initiative du site. "Le contexte actuel est difficile pour les professionnels de la nuit, mais il est excessif de dire que la nuit parisienne est morte. Auprès des étrangers, elle garde une excellente image."

A l'exception du Showcase, sous le pont de l'Alma, Paris a vu ses grandes discothèques fermées depuis dix ans. Le Palace est devenu un théâtre, les Bains-Douches sont victimes d'un conflit entre propriétaire et locataire, la Loco sera bientôt transformée en restaurant par le Moulin-Rouge.

"Tout n'est pas de la faute des autorités
, tempère Jean-Bernard Bros. Certains acteurs n'ont peut-être pas su s'adapter aux nouvelles façons de sortir des Parisiens. Pourquoi faut-il encore attendre minuit pour aller en discothèque ?" M. Bros reconnaît toutefois que les autorités françaises ont tendance à envisager la nuit comme un monde "glauque, bizarre et forcément dangereux". "Il faut redorer le blason de la nuit. D'après l'Insee, elle concerne tout de même 45 % des Parisiens, qu'ils travaillent ou sortent entre 20 heures et 6 heures. C'est énorme." Sans compter les touristes ou visiteurs "court séjour", qui souhaitent profiter autant du jour que de la nuit.

Les signataires de la pétition réclament la tenue d'Etats généraux de la nuit. Une façon de relancer l'Observatoire des lieux de vie et de diffusion musicale, créé en 2004 par la Mairie, en sommeil depuis 2006. Trois réunions sont prévues en janvier 2010. Certains évoquent un possible "zonage festif" de quelques rues à Paris, d'autres une aide financière pour adapter enfin véritablement les salles parisiennes, souvent anciennes, aux nouvelles normes. Les 30 millions d'euros issus du tourisme pourraient être un argument de poids dans les discussions.

Odile de Plas / Article paru dans l'édition du 01.12.09

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